Droit de réponse : Le SNAT écrit à l'UFC-Que Choisir
Passée la vague médiatique qui a suivi le "comparatif" publié par Que Choisir le 18 février 2021, le Syndicat National des Artistes Tatoueurs et des professionnels du tatouage a repris en détail l'article du magazine de l'UFC-Que Choisir.
Le S.N.A.T. fait valoir un droit de réponse dans une lettre répondant point par point aux prétendus dangers soulevés par l'UFC, et soulignant le caractère biaisé et partial de ce comparatif, lequel ne constitue nullement une étude scientifique ou médicale, mais présente différentes affirmations alarmistes et trompeuses.
Cette lettre a été adressée le 27 février 2021 au Directeur de publication de l'UFC-Que Choisir, ainsi qu'à la DGS (Ministère de la santé), à l'ANSM et la DGCCRF.
Bien que les tatoueurs professionnels ne soient pas ici directement visés, plusieurs interlocuteurs UFC-Que Choisir n'ont pas manqué d'incriminer la responsabilité des tatoueurs dans différentes interviews depuis le 18 février.
Le contenu et la présentation de cet article sont de nature à porter atteinte à leur intégrité professionnelle.
Nous demandons ainsi à rétablir et à préciser les faits dénoncés par Que Choisir en invoquant notre droit de réponse.
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Le Syndicat National des Artistes Tatoueurs et des professionnels du tatouage (S.N.A.T.) souhaite apporter les clarifications suivantes sur l'article
"Tatouages. Beaucoup trop d'encres toxiques",
rédigé par Élisabeth CHESNAIS
et publié dans le magazine Que Choisir Mensuel n° 600 (Mars 2021).
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Sur l'absence d'évaluation de santé
Si aujourd'hui on ne dispose pas de données de sécurité, aucune analyse quantitative d'un échantillon de 20 produits dont la source de distribution précise n'est pas identifiée, ne peut à elle seule porter à conclusion et permettre d'affirmer que "15 encres sur 20 sont disqualifiées." Le SNAT a rappelé au Ministère de la santé et à l'ANSM la nécessité d'initier des études in vivo en situation réelle, analysant à la fois les quantités et les concentrations de produits et leur devenir chimique. De telles études manquent absolument pour disposer de données objectives sur le tatouage. Or, l'étude de l'UFC-Que Choisir a été menée en l'absence de toute étude épidémiologique en parallèle, sans compter que les remontées d'information restent à ce jour anecdotiques et ne démontrent aucun danger à grande échelle. L'absence de tels travaux analytiques ne permet pas de conclure de manière objective à une mise en danger des tatoués ou des tatoueurs.
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Sur les "compositions alarmantes" des produits testés
Les termes de l'article évoquent de manière répétée des "résultats inquiétants". Si une telle étude devait soulever un problème de conformité avéré - celui-ci restant à vérifier -, il devrait en premier lieu être confronté aux fabricants : L'UFC-Que Choisir a préféré ici miser sur une annonce racoleuse ("Exclusif : Tatouages. Du poison dans les encres") pour introduire une énumération de termes et de chiffres plus anxiogènes que réellement significatifs pour le public. Pour autant, "non conforme" ne signifie pas automatiquement "dangereux" : C'est pourtant le raccourci qu'a fait l'UFC sans nuance. Sans connaître la méthodologie précise de l'UFC et sans enquête analytique, il est impossible d'établir une causalité entre la toxicité supposée des encres et d'éventuels effets indésirables sur l'organisme. Seule une lecture scientifique et clinique de données épidémiologiques dans le cadre d'études méthodiques et reproductibles pourrait ainsi faire sens en matière de santé publique.
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Sur les substances cancérogènes
Là encore, toute nuance est oubliée : On martèle ici le potentiel cancérogène de substances en omettant de mentionner l'absence de causalité entre cancers de la peau et tatouages. Une revue complète de la presse médicale depuis 20 ans permet pourtant de l'affirmer, le Haut Conseil de Santé Publique l'a même rappelé dans son avis du 15 décembre 2020 : IL N'Y A AUCUN LIEN DE CAUSALITÉ ENTRE TATOUAGE ET CANCER DE PEAU... Trois études menées en 2017 ont même conclu sur un effet "protecteur" des tatouages, en soulignant que l'effet cancérigène d'un tatouage contenant des carcinogènes apparaissait cliniquement négligeable comparé aux effets d'une exposition solaire. Une autre étude de 2016 a également révélé que se faire tatouer plus d'une fois stimulait et renforçait notre système immunitaire !
Toute notion de dosage est également oubliée : Un tatouage introduit une quantité limitée de produit dans la peau. C'est une dose fixe dans la peau à vie, il n'y a pas d'exposition répétée à de nouvelles doses comme avec d'autre produits. L'UFC-Que Choisir, réputée pour son objectivité, aurait matière à se pencher sur le cas des pigments médicaux et esthétiques : Sur un volume de population incomparable, ces encres, sous couvert de labellisation en dispositifs médicaux ou assimilés, échappent à toute étude d'innocuité et de vigilance. Par définition labiles, elles sont appliquées de manière répétée et régulière sur des clients ou des malades, qui intègrent ainsi des doses cumulées de pigments. Considérant le recours grandissant au tatouage esthétique ou réparateur, il serait logique d'inclure ces produits dans une revue à visée exhaustive.
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Sur la migration de pigments dans les ganglions
Si l'étude du Synchrotron de Grenoble "a jeté un pavé dans la mare", le constat démontré grâce à des "équipements ultraperformants" était reconnu depuis... La fin du 19ème siècle. Des scientifiques évoquaient déjà cette dispersion de "fragments colorés". Les ganglions « encrés » n’ont ceci dit jamais causé de problème : Aucune évidence de pathogénicité n’a pu être montrée quant à la présence de pigments dans les ganglions lymphatiques qui, rappelons-le, contiennent les produits métabolisés de toutes les substances ingérées par le corps humain. Le corps médical a utilisé pendant des dizaines d’années de l’encre de Chine pour les marquages préalables à la radiothérapie sur des patients atteints de cancer : L’usage plus récent d'encres de tatouage "médical", contenant des substances similaires et des pigments communs à ceux du tatouage traditionnel, serait inimaginable si un réel risque sanitaire était à craindre.
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Sur un bilan de test "catastrophique"
Pour effectuer ses propres tests, Que Choisir avoue que "l'affaire était délicate !" Pour autant, les enquêteurs déclarent avoir simplement "acheté des encres sur Internet comme le font les tatoueurs." Seule précision concernant les sources d'achat : "des sites français." Deux marques (Kashoku et Viking-Ink) sont totalement inconnues des professionnels : Connaissant la facilité à trouver sur Internet de nombreuses contrefaçons dont font l'objet les grandes marques d'encres de tatouage, on peut s'interroger sur la nature réelle des produits testés. Les tatoueurs professionnels s'approvisionnent expressément auprès de distributeurs français identifiés et régulièrement contrôlés, en capacité d'assurer la traçabilité et la documentation de certification des produits vendus. Les certificats de conformité sont établis en Europe par le CTL (Chemical Technological Laboratory) pour toutes les encres de tatouage distribuées sur les réseaux professionnels : Comment expliquer que les résultats du CTL divergent de ceux de Que Choisir ?
À l'occasion de plusieurs interviews, vous avez indiqué avoir saisi la DGCCRF et l'ANSM pour procéder au retrait et au rappel des encres visées dans votre article, tout en exigeant des tatoueurs une meilleure vigilance et une plus grande responsabilité, comme s'ils n'en témoignaient pas déjà. Notre syndicat, en lien régulier avec les administrations de contrôle, travaille pourtant en étroite relation avec la DGS. La norme européenne de bonnes pratiques est un exemple récent des travaux réalisés par le SNAT au sein de la commission AFNOR, avec les services de la DGS.
Nous espérons donc qu'une telle "alerte" ne suscitera pas des décisions arbitraires prises dans la précipitation, alors que les tatoueurs, en première ligne quant à l'utilisation de leurs produits, font preuve du plus grand sérieux sur leurs pratiques, dans le souci permanent de la santé de leurs clients, dont beaucoup se comptent aussi parmi leur propre famille ou leurs proches amis.
Nous regrettons enfin que vous n'ayez pas écrit une ligne sur le fléau des tatoueurs clandestins, probablement encore plus nombreux que les professionnels déclarés, et dont l'augmentation est réellement alarmante : Ces opérateurs usent, au mépris de toutes les règles d'hygiène, de produits non identifiables, achetés "simplement" sur Internet, comme pour ceux que vous avez testés ! Une problématique totalement écartée dans l'enquête publiée par Que Choisir.
Lien vers cette page :
www.snat.info/articles/70441-droit-de-reponse-le-snat-ecrit-a-l-ufc-que-choisir
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